Consultation Nationale : Cognition Sociale en Neuropsychologie Française

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  • For international researchers: Anonym data from the survey are available on request (maxime.bertoux@inserm.fr);

  • For non-French speaker: Read the paper accepted in Applied Neuropsychology: Adult

En 2020, 502 personnes ont participé à notre consultation nationale sur la cognition sociale en neuropsychologie Française, réalisée en partenariat avec l'OFPN, l'Organisation Française des Psychologues Spécialisé.e.s en Neuropsychologie. Cette enquête visait à caractériser les pratiques actuelles, les représentations et les besoins des neuropsychologues et futur.e.s neuropsychologues quant à la cognition sociale. Au total, 375 professionnel.le.s et 127 étudiant.e.s en Master (M1 et M2) ont répondu à l'appel, soit un dixième des neuropsychologues français.e.s et près de la moitié des promotions de Master.

Ces résultats seront publiés en détail dans le journal Applied Neuropsychology: Adult. Vous pouvez lire les principaux résultats en Français sur cette page, ou bien télécharger l'article (en anglais) en cliquant ici.


Les participant.e.s à l'enquête

Qu'est ce que la cognition sociale ?

Pour que les participant.e.s puissent répondre facilement à cette première question, nous avions opté pour l'évocation libre, en les invitant à livrer mots-clefs, théories, concepts, noms d'auteur.ice.s, fonctions, processus, outils, etc. qui leur venait en tête à la lecture des termes "Cognition sociale". Parmi les 10 termes les plus donnés lors de cette évocation, deux concepts dominent les réponses puisqu'ils sont mentionnés plus de 50% du temps, à la fois par les neuropsychologues et les étudiant.e.s: théorie de l'esprit et émotions. Si 66 termes différents ont été mentionnés à cette étape, les répondant.e.s semblent néanmoins, en grande majorité, limiter la cognition sociale à ce qui est souvent défini comme son noyau de fonctions ("core components" en anglais).


Termes évoqués spontanément par les mots clefs "Cognition sociale" (% de répondant.e.s)

Un domaine distinct, largement distribué cérébralement

Face à des propositions auxquelles les répondant.e.s devaient répondre "Oui", "Non" ou "Je ne sais pas", on note qu'une majorité de professionnel.le.s et d'étudiant.e.s considèrent la cognition sociale comme un domaine distinct des autres domaines classiques (mémoire, langage...), composé à la fois de fonctions générales (non sociales) et spécifiquement sociales, largement distribuées dans le cerveau, même s'ils et elles prêtent au lobe frontal un rôle majeur. Enfin, 70% sont d'accord pour ne pas considérer la cognition sociale comme une fonction (ou un ensemble de fonctions) exécutive.

Deux acceptions de la cognition sociale

Les répondant.e.s devaient ensuite déterminer si des symptômes listés étaient ou non des manifestations typiques d'un trouble de la cognition sociale. Pour certains symptômes, les participant.e.s sont unanimes. Pour d'autres (par exemple, la difficulté à reconnaître les visages), les réponses sont plus contrastées, et indiquent une acception plus large de ce qu'est la cognition sociale. Nous pensons que ce contraste reflète une tension entre les taxonomies issues de la neuropsychologie classique (délimitant rigoureusement les domaines cognitifs) et de la psychologie sociale (considérant que la cognition, sans son ensemble, peut être socialement contextualisée). Enfin, les réponses à certaines propositions (par exemple: "Une tendance aux activités stéréotypées ou routinières") semblent marquées par l'influence d'une approche syndromique, ces manifestations étant souvent associées à des troubles de la cognition sociale, sans être pourtant intrinsèquement sociales.


Une formation insuffisante des futur.e.s neuropsy ?

Chez les étudiant.e.s, 19% jugent que la cognition sociale n'est pas abordée au cours de leur formation. Elles et ils sont une majorité à estimer qu'entre 5 et 10h de leur formation sont liées à la cognition sociale en Master. Pour une majorité des étudiant.e.s, la cognition sociale n'a jamais été abordée durant leur cursus de licence. 70% des étudiant.e.s sont demandeur.se.s de plus d'enseignements liés à ce sujet, puisque 56% d'entre elles et eux sont assez ou très insatisfait.e.s du volume horaire actuel dédié. Ainsi, lorsqu'il s'agissait de juger si elles ou ils se sentent suffisamment formés en rapport à la cognition sociale, une très large majorité des étudiant.e.s jugent que non. Ce résultat contraste nettement avec leur réponse quant à la mémoire ou les fonctions exécutives.


Un manque de confiance flagrant chez les professionnel.le.s

Chez les neuropsychologues, 37% confient ne pas avoir bénéficié d'un enseignement spécifique de la cognition sociale pendant leurs études (durant les cours, les stages, les mémoires ou la thèse). Plus on s'éloigne de l'année d'obtention du diplôme, plus ce chiffre est élevé. Cela suggère une amélioration des enseignements avec le temps.

Ensuite, nous leur avons demandé leur niveau de confiance dans l'évaluation des troubles de la cognition sociale, ou dans leur réhabilitation (sur une échelle de 1 "Basse: je ne me sens pas à l'aise" à 5 "Haute: je me sens expert.e"). Des questions similaires étaient posées pour la mémoire et les fonctions exécutives. Les résultats montrent une différence nette du niveau d'assurance des neuropsychologues face à l'évaluation ou au diagnostique de ces domaines. Le résultat est très similaire concernant la stimulation cognitive ou la réhabilitation des troubles. En grande majorité, les neuropsychologues se sentent confiant.e.s ou très confiant.e.s pour l'évaluation, le diagnostic ou la réhabilitation des troubles de la mémoire ou des fonctions exécutives (elles et ils se jugent souvent "expert.e.s"), mais beaucoup moins en ce qui concerne les troubles de la cognition sociale. Le niveau d'expérience (nombre d'années depuis le diplôme) ne semble jouer aucun rôle dans le niveau d'assurance des neuropsychologues, mais celles et ceux travaillant en psychiatrie se sentent toutefois plus en confiance, que ce soit pour l'évaluation ou la réhabilitation des troubles de la cognition sociale.

4 outils utilisés par la majorité des neuropsy

Nous avons ensuite cherché à identifier les tests ou échelles de cognition sociale utilisés par les neuropsychologues dans leur pratique clinique, et à quantifier leur utilisation. Une liste exhaustive des tests disponibles en français était ainsi présentée aux participant.e.s, qui devaient indiquer leur fréquence d'utilisation: jamais, rarement, occasionnellement, fréquente ou quotidienne. Les résultats concernant les vingt tests les plus utilisés sont présentés sur la figure suivante. Trois tests (le test des faux pas, les épreuves de théorie de l'esprit et le Tom-15) et une batterie (la mini-SEA) sont utilisés par plus de la moitié des participant.e.s. Bien sûr, des variations sont observées entre les spécialités des psychologues, et les populations avec lesquelles elles et ils travaillent (par exemple, la NEPSY II est très utilisée par celles et ceux travaillant avec les enfants; la mini-SEA par celles et ceux travaillant avec les adultes).

La fréquence d'utilisation des tests reste pourtant très basse puisque seulement 28,5% des neuropsychologues déclarent utiliser un test de cognition sociale fréquemment ou quotidiennement. Si l'on considère l'usage quotidien, ce chiffre tombe à 8%.


Fréquence d'utilisation des tests (%)

Pourquoi si peu d'utilisation ?

Dans un dernier volet de l'enquête, nous avons demandé aux neuropsychologues de juger, sur une échelle de 1 à 5, quelles étaient selon elles ou eux les limites rencontrées à l'utilisation de tests évaluant la cognition sociale (1 étant "n'est pas une limite" et 5 "une limite très importante"). Nous pouvons constater que le manque de données normatives des tests disponible en Français, le manque d'information sur les tests français ainsi que l'absence de traduction française des tests étrangers sont les principales limites identifiées.


Limites à l'utilisation de tests de cognition sociale

En savoir plus

Les observations permises par cette enquête sont discutées dans l'article publié relatant les résultats détaillés. Dans cet article, un certain nombre de recommandations sont avancées en vue de favoriser le développement des connaissances et des pratiques liées à ce domaine essentiel de la cognition, mais aussi leur dissémination.

Lire l'article publié dans Applied Neuropsychology: Adult.


99% des participant.e.s ayant souhaité en savoir plus sur la cognition sociale, nous vous invitons à lire cet article paru très récemment pour une revue rapide ou une mise à jour:

Bertoux M. Cognition sociale. EMC - Neurologie 2022:1-10 [Article 17-022-E-30].

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Psychologists_Questions.pdf

Data (Questions)

Neuropsychologists

Students_Questions.pdf

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